Bobby on the road

C’est un endroit qui ressemble a la Louisiane, a l’Italiiiiie. En fait non, pas vraiment. Ou alors si, mais a la Louisiane des marecages post-Katrina, et a l’Italie alpine. Ca ressemble donc plutot a la Conte de ces chers hobbits, voire a l’Auvergne de ce cher Giscard. Bref, je suis dans le Terelj, parc national mongol, a 80km au nord-est d’Oulan-Batour, et les paysages me sont plutot familiers. Du vert, du vert, du vert.

Je suis la pour 5 jours et 4 nuits, en immersion dans des familles nomades mongoles, et c’est du reve. Ces gens ont une vie simple. Ils bougent deux fois l’annee, en juin et decembre. Ils habitent dans des yahourts, mais ne prononcent pas le « a» .


Ils ont des chevres, des fiers chevaux, des amies brebis, des vaches, des yacks, et parfois des « ox» , sortes de batards degeneres d’une vache et d’un yak (coquin le yak!), tout juste bon a tirer les charettes… Ici, on ne parle pas anglais, on se lave dans la riviere, et on chie dans les bois. On ne mange evidemment que les produits de l’elevage. Alors c’est yak et lait de yak, matin, midi et soir.
Le premier soir, dans ma nouvelle famille, je croise la route d’une television, criarde, qui diffuse en soiree des films de bollywood doubles en mongols (habilement, en gardant tout ou partie de la bande son d’origine pour plus de subtilite a l’oreille…). Je passe mon chemin et j’esquive la soiree tele… mais je suis requisitionne pour rameuter les chevres avec Batra, 9 ans, minuscule funanbule, short trop petit, sweet polaire « abibas»  et tongues roses dechirees. N’empeche qu’il me largue dans les montees, ce gamin debrouillard. Les momes de la-bas sont etonnants, vraiment. Des l’age de 2-3 ans on les voit participer a toutes sortes de taches penibles de la vie quotidienne : corvees de bois et d’eau, nettoyage des bouses, traite des animaux…avec le sourire, toujours. J’y echapperai pas non plus a ces corvees, mais moi je l’ai choisi, je suis venu la pour ca !

Le deuxieme jour, grande etape dans ma vie, premiere sortie a chevel; un petit pas pour le canasson, un grande chute pour mon estime personnelle. Le cheval c’est marrant, mais c’est ma toute toute premiere fois, et je crois bien qu’il le sent. Au bout de 5 km, grande steppe herbeuse. Tsaltsa, mon guide de 15 ans, lance son cheval au galop ; je le suis, plus ou moins consciemment. L’allure est reposante pour mon arriere train, je prends le pli et commence a apprecier la decharge d’adrenaline. 2 minutes plus tard, tout s’accelere, puis je me vois tomber, par anticipation, presque au ralenti. Facon de parler, a 30 km/h. Exactement le meme genre de chute qu’en snowboard quand on a voulu envoyer un peu trop de fat sur la derniere bosse du snowpark pour excuser notre timidite sur les precedentes…On est en l’air, pas vraiment dans le sens qu’il faut, et on ne peut rien y faire. Resultat : une belle boite laterale sur le flan droit, plus de peur que de mal, le cheval (pas si mongol que ca) m’a evite. Quelques egratignures decorent mes bras et un tatouage guerrier orne mon posterieur. Classe.
Les jours suivants seront occupes a couper du bois sous l’orage, chier dans les bois, conduire des charettes avec des jeunes sauvageons dedans, chier dans les bois, tirer a l’arc, jouer aux osselets, chier dans la riviere (chouette, une variante), m’essayer a la lutte mongole, et m’occuper des animaux, qui, vraiment, sont au centre de toutes les etapes de la journee, du lever au coucher.

J’ai l’impression, certes, d’avoir decouvert une nouvelle culture, des nouvelles coutumes et des gens differents. Mais reflexion faite, ca ne me semble pas si eloigne de la vie des anciens chez nous, agriculteurs et eleveurs, il y a une soixantaine d’annees. Sauf que ces nomades cherchent a preserver cette vie, cet equilibre. La vie en harmonie avec leur milieu naturel est emminemment importante. La tele mentionnee plus haut fonctionne a l’aide d’un panneau solaire, evidemment. Il ne savent pas grand chose du monde, eux, mais je pense qu’ils ont compris l’essentiel, eux.